Le Père Capucin
Voici une compilation des histoires paysannes que racontait Louise
Livet (qui, pour la plupart, sont inspirées ou copiées des « Contes
de Jean-Pierre » du poète Louis Mercier). Je ne sais pas si
elle en a inventées et écrites elle-même.
Il s'agit de contes relatant la vie paysanne du canton de Belmont
de la Loire (42) dans la première moitié du XX eme siècle. A
l'origine tous ces contes sont issus de la tradition orale en patois
local, une variante du franco-provençale.
C'est pourquoi les retranscrire est un exercice difficile :
il ne faut pas faire trop attention à la concordance des temps, aux
changements de narrateur ou de sujet. De nombreux mots ou expressions
sont directement tirés de cette langue et n'existent pas en
français.
Louise Livet fût une conteuse exceptionnelle en patois jusqu'à
sa mort en 2016. Ses cahiers, entièrement écrits à la main,
cumulent sans doute près de 300 contes.
Aux alentours de Charlieu
dans un village se trouvait un couvent des pères Capucins et dans
son village il y avait un homme qu'on appelait le Capucin (de son
vrai nom Claudius Pallasson). Il était appelé Capucin, oh, ce n'est
pas qu'il était plus sage qu'un autre, mais il avait une barbe aussi
longue des poils de chèvre, il avait plus de cheveux sur le crâne,
c'est pourquoi qu'il ressemblait à un moine ! Le Claudius
toutes les fois qu'il allait au bourg revenait toujours avec une
cuite ! Même que son Amandine allait souvent à sa recherche le
soir avec une lanterne et le trouvait affalé dans quelques rases ou
dans des trous. Un dimanche les jeunes venaient de jouer une pièce
de théâtre, dans cette pièce il fallait jouer un rôle de moine
(ils avaient été trouver monsieur le curé pour qu'il se procure
une robe de moins chez les frères Capucins).
Lorsqu'ils avaient fini
de jouer tous les jeunes restaient ensemble pour souper et passer la
veillée, c'était bien minuit quand ils se séparèrent. Dehors il
faisait un joli clair de lune, et s'en allant ils virent bouger
quelque chose dans le fossé, ils allèrent voir, c'était le
Claudius saoul comme un cochon. Ils le trigossèrent pour le
réveiller, rien à faire, pourtant on ne peut pas le laisser là. Le
Jules dit : « Nous allons lui faire une farce. Je vais
aller chercher ma robe de Capucin que j'avais pour jouer et nous
l'habillerons en vrai Capucin : Je vais chercher mon petit
chariot et nous l'emmènerons au couvent. Qu'est-ce qu'ils vont
dire ! » Ils l'acculèrent à la porte et tirèrent la
sonnette.
Le frère portier vient ouvrir. Le Jules explique qu'ils
ont trouvé ce Capucin dans la rue et crurent bien faire de
l'emmener. Le frère alla faire lever les autres Capucins qu'arrivent
avec une lanterne et regardent sous son nez : « Je ne le
connais pas il n'est pas de notre couvent. Nous allons le mettre dans
une cellule pour la nuit et au matin nous verrons bien d'où il
vient. » Pendant ce temps les jeunes ont décampé en riant !
Quand le Claudius se réveilla se dit : « Où donc que je
suis ? C'est sûrement les gendarmes qui m'ont ramassé et m'ont
foutu au violon. » Tout à coup en se regardant se voit en
habit de Capucin ! « Comment que ça se fait donc ?!
Ma femme sera bien attrapée quand elle saura que je suis Capucin. »
Au même moment le frère entre avec une bande de moines : « Mon
père nous direz-vous qui vous êtes ?
- Qui je suis ? J'étais le vigneron, l'homme de la grosse Amandine ! Elle va faire joli mon Amandine ! »
En écoutant ces
bredineries les Capucins ont compris que c'était des gamins qui
s 'étaient amusés à lui jouer un tour et qu'ils avaient amené
un soulot ! Ils lui arrachèrent la robe qui les déshonorait,
le poussèrent vers la porte en lui envoyant un coup de sandales par
les fesses et l'envoyèrent s'étaler au milieu de la rue ! Ma
foi quand il eut bien réalisé qu'il était sans retour alla trouver
son Amandine qu'était dans toutes ses colères : elle ne voulut
pas entendre ses explications ! Alla chercher un gros genêt et
lui en donna des coups qu'il en avait les reins toute écalés !
Si bien que notre Claudius parla de demander le divorce et voulut
entrer chez les Capucins.
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